À un moment de ma vie, j’ai essayé d’être moderne : de me servir par exemple de l’agenda électronique de mon smartphone ! Bon, depuis j’ai renoncé… Mais à l’époque, mes filles profitaient de mes efforts avec cet engin pour me faire des blagues.
Un jour par exemple, j’étais en train de parcourir mon agenda pour voir un peu ce qui m'attendait quand je tombe sur une date bizarre : un truc planifié pour 2068 ! Wow... Qu’est-ce que c’est que ça ? J’aurai alors plus de 100 ans ! Une erreur, sans doute. J’ouvre la page et je lis : « 1er décembre 2068, 18 heures : fin du monde ». C’est bon, j’ai compris, c’est encore un coup de mes filles : à l’époque, elles me chipaient régulièrement mon téléphone pour y glisser de faux messages, de faux rendez-vous, ou des photos de grimaces loufoques. Mais comme aucune n’a jamais avoué être l’auteure de cette prophétie, je vous transmets tout de même l’info : la fin du monde, d’après le fantôme dans mon téléphone, c’est peut-être pour 2068 !
Sans rigoler, moi, la fin du monde, ça me touche. Je fais partie de la génération des baby-boomers qui a grandi avec la menace de guerre atomique et les affolements survivalistes des grands anxieux qui se faisaient construire des abris enterrés au fond de leur jardin, avec réserves d’eau, boîtes de conserve, médicaments et tout le tremblement…
Alors aujourd’hui, le discours des collapsologues me touche, forcément. Mais il a, à mes yeux, quelque chose de plus sympathique que ce que j’ai connu dans mon enfance. Ce discours n’émane pas de prophètes de malheur, mais de chercheurs et penseurs bien informés. Il ne nous pousse pas à la paranoïa ou à l’égoïsme mais à la lucidité et à la solidarité. Il nous dit, ce discours : « oui, le pire va sans doute arriver ; oui, notre monde va sans doute s’effondrer ; mais on pourra s’en tirer si on se serre les coudes ».
Se serrer les coudes, mais aussi accepter de voyager léger et de vivre de peu, comme on le chantait déjà en 1991…
Oui, si notre monde s’effondre, nous aurons besoin de vivre avec moins, de faire le deuil de toutes nos dépendances énergétiques et matérialistes. Mais surtout, nous devrons comprendre qu’il sera alors inutile de vouloir survivre égoïstement, de seulement chercher un abri pour y vivre comme avant.
Quand tout menace de s’effondrer, on se met à mieux écouter les prophètes, mais aussi les poètes. Et voilà ce que nous dit l’un d’entre eux, Christian Bobin : « Fou celui qui se croit à l’abri. Je ne cherche pas un abri. Ce ne serait qu’un endroit pour y mourir sans bruit. Je cherche ce qui arrive quand on n’est plus protégé et qu’on n’a plus peur de rien. »
Ouh la, ça va nous faire bizarre de renoncer à toutes nos protections et toutes nos peurs. Mais ça va peut-être aussi nous faire du bien…
Et en attendant, on fait quoi ?
Eh bien, on fait de notre mieux : on agit individuellement (moins de voiture, moins d’avion, moins de viande, moins de plastique, moins de vêtements), on agit collectivement (en rejoignant des associations et en militant), on agit électoralement (en votant pour des politiques qui agissent vraiment pour l’environnement). C’est vrai, on ne sait pas si tout ça suffira ; mais au moins on n’aura pas de regrets !
Et vous, vous le voyez comment le monde de demain ?
Illustration : la fin du monde, vue par les dieux depuis le mont Olympe.
PS : ce texte reprend ma chronique du 5 février 2019, dans l'émission d'Ali Rebehi, "Grand bien vous fasse", tous les jours de 10h à 11h sur France Inter. Également disponible en vidéo.
Illustration : la fin du monde, vue par les dieux depuis le mont Olympe.
PS : ce texte reprend ma chronique du 5 février 2019, dans l'émission d'Ali Rebehi, "Grand bien vous fasse", tous les jours de 10h à 11h sur France Inter. Également disponible en vidéo.