mardi 30 juin 2009

Au revoir et merci


En commençant ce blog, au mois de mars, je m’étais promis de tenir bon et d’y écrire tous les jours sauf le week-end.
Le plus souvent, ce fut un plaisir. Parfois, ce fut plus difficile : non parce que je n’avais pas envie ou pas d’idées (la vie est trop intéressante pour nous laisser ainsi à court), mais parce que j’étais de temps en temps un peu débordé par les "choses à faire" et les "choses à vivre".
Je m’étais fait aussi une autre promesse : d’arrêter pour les grandes vacances. Pour me reposer, pour vous reposer, et parce qu’en été, moins on passe de temps devant son écran et mieux c’est. Et pour rendre hommage aux étés de nos enfances, longs, lents, si différents des mois de l'année scolaire.
Alors, au moment de nous quitter temporairement, je souhaite vous remercier, très intensément et très sincèrement, pour votre présence à mes côtés durant ces derniers mois. Je suis aussi heureux et honoré de votre intérêt après ces quatre mois ensemble qu’aux premiers moment de ce blog. J’ai lu tous vos commentaires chaque jour, avec curiosité ; j’ai appris, j’ai souri : ça m’a plu !
Nous nous retrouverons (pour ma part, en tout cas) en septembre. En attendant, je laisse la porte ouverte : l’espace de commentaires qui suit peut accueillir vos pensées et états d'âme de l’été, comme autant de cartes postales destinées aux visiteuses et visiteurs de passage et aux habitué(e)s.
Bonnes vacances et bel été !

Illustration : photo de Florian Kleinefenn

lundi 29 juin 2009

Adieu Monsieur le Professeur


Ça sent les vacances. En tout cas pour les écoliers et autres collégiens.
J'étais samedi dernier à la fête de l'école de ma plus jeune fille, qui rentre en sixième l'an prochain. Donc c'était, à moi aussi, "ma" dernière fête d'école primaire en tant que papa. Et du coup, j'ai eu des bouffées de souvenirs d’enfance autour de cette période. Je me souviens parfaitement de mes fins d’années scolaires. Ce sont des moments à haute densité sensorielle (la chaleur, la lumière, les bagarres d’eau, les odeurs de vacances, le sentiment d'avoir une éternité de vie devant soi) et émotionnelle (les longues récréations propices aux premières amours de cour de récréation, les séparations d’avec les copains et copines, et d’avec nos enseignants).
Et c’est drôle comme je me souviens aussi de toutes mes «maîtresses» et de la plupart de mes professeurs. Aujourd’hui encore j’ai des sentiments très forts de reconnaissance pour tout ce qu’ils m’ont apporté, l’amour du travail, de la lecture, de la science. Le souci de ne pas les décevoir a été un des moteurs de mes bons résultats scolaires (même si j’étais aussi un bon élève parce je trouvais tout intéressant, c’est si bon d’apprendre !).
Bref, grand amour pour l'école et les profs, et du coup, grande tendresse pour cette vieille chanson un peu sentimentale de Hugues Auffray : Adieu Monsieur le Professeur. Qui me semble concentrer en quelques phrases simples toute la beauté (et un peu de la tristesse aussi) de ce métier d’enseignant : donner, aimer et laisser s’éloigner. Ce qui s'applique aussi à beaucoup des rencontres et des séparations de notre vie.

vendredi 26 juin 2009

Temps qui passe


Lors de mes ballades dans le bois, je croisais souvent il y a plusieurs années, un grand-père assis sur un banc, lisant à côté d’un landau où un bébé dormait. Un jour, le landau a disparu : je les croisais désormais tous les deux debout, le grand-père donnant la main à une petite créature maladroite et souriante, qui perfectionnait sa marche. Puis un jour, plus personne. Le petit-fils n’avait plus besoin de son grand-père pour aller au bois. Ou le grand-père ne pouvait plus l’accompagner. Mélancolie douce.

jeudi 25 juin 2009

Ben alors, il est où mon caddy ?!


Un jour, lors de vacances au ski, je faisais les courses dans le petit supermarché du coin. C’était mon tour de trouver de quoi nourrir 20 personnes. Je commence à remplir mon caddy, puis après deux ou trois achats, je le laisse un moment tout seul, pour me faufiler dans un petit recoin de rayon. Et alors que je reviens, avec du lait ou de l’huile dans les bras, il n’est plus là. Je cherche un peu dans l’allée voisine : disparu !
Mince alors. Quel intérêt à voler un caddy ? Je me dis que j’ai dû le mettre ailleurs ; je recommence à chercher. Et là, je vois mes premiers achats balancés sur des carottes : quelqu’un avait vidé puis embarqué mon caddy. Eh bien ça m’a fait passer un sale quart d’heure. Un peu agacé bien sûr (je m’étais fait piquer une pièce de 1 euro, et je devais retourner sur le parking chercher un autre chariot). Mais surtout attristé : le monde avait changé.
Autour de moi, il y avait désormais, au lieu de braves vacanciers et de paisibles habitants du coin, des coupables potentiels : des malpolis, des malhonnêtes, des sagouins paresseux et inciviques. Enfin, il y en avait au moins un, mais tout était contaminé, bien sûr. J’étais tout troublé par ce micro-délit : des gens qui vont ensuite remplir leur caddy de 100 ou 200 euros de nourriture, mais qui piquent calmement, vite fait bien fait, le chariot de quelqu’un d’autre.
Je n’aime pas être confronté à ça : ça me rend triste, et ça me fait dépenser de l’énergie psychique pour me calmer, relativiser et me dire que ce n’est pas méchant, qu’il y a des choses immensément plus graves, que ça a toujours existé, ces petites incartades, et que les gens qui ont fait ça ont peut-être aussi des gens qui t’aideraient si tu en avais besoin. Bref, tout un boulot pour se pacifier la tête. Pour remonter de l'émotion secondaire (la colère) à l'émotion primaire (la tristesse), puis pacifier celle-ci pour qu'elle devienne psychologiquement digeste et utilisable.
N’empêche, mon chariot, je l’ai eu à l’œil ensuite. Et j’avais le regard d’un policier à chaque fois que je croisais un « suspect » : un sourire un peu large, un regard fuyant ? Est-ce que ça ne serait pas lui qui..?
Moralité de l’histoire (je ne vais pas non plus vous en faire des tonnes sur un caddy) : j’ai eu de la chance, comme souvent. J’ai eu droit à un petit rappel sans gravité de ces deux réalités : 1) les vacheries font partie de la vie ; 2) je suis comme tout le monde, une bêtise peut m’embarquer dans des états d'âme disproportionnés, tout psychiatre que je suis. Allez, au boulot mon vieux, travaille ton recul…

mercredi 24 juin 2009

Mauvaise odeur

Ma fille Céleste, toute petite, à propos d’une mauvaise odeur : «Pouah ! Ça m’dégoûte le nez !»

mardi 23 juin 2009

Moment de grâce


Un jour de printemps ou d’été, un après-midi tout calme, sûrement des vacances ou un dimanche, je ne me souviens plus. La maison est vide. J’entends dans le jardin des petits bruits, des bribes de chanson d’enfant. Je me penche par la fenêtre : une de mes filles, 5 ou 6 ans à l’époque, joue tranquillement, sans avoir besoin de personne. Elle tourne sur elle-même en chantonnant doucement, plongée dans son monde. Ou simplement intensément présente à celui-ci.
Une petite fille qui danse toute seule.
Pleine de grâce.
Une petite fille qui danse, toute seule, en chantant doucement sa chanson.
Merci la vie, merci beaucoup.

Illustration : Félix Vallotton, Le ballon, Musée d'Orsay.

lundi 22 juin 2009

Solstice d'été


À partir d'aujourd'hui les jours se mettent à raccourcir tout doucement. Même s'il va faire de plus en plus beau, même s'il va faire de plus en plus chaud, les jours vont devenir de plus en plus courts. Lorsque je pense à ça, je me sens un peu triste, mais pas seulement. Il me semble que cela m'ouvre les yeux sur des choses essentielles.
J'aime bien ces mouvements enchevêtrés et complexes - d'un côté on gagne, de l'autre on perd - qui nous forcent à réfléchir.
Imaginez que tout ait lieu d'un seul coup : les jours courts, le froid, la pluie, la nuit... Alors que là, c'est plus subtil, nous continuons de progresser d'un côté, mais en réalité nous déclinons de l'autre. Dès que l'été commence, il est sur le déclin. Comme nous : dès la première seconde de notre vie, nous commençons à vieillir. S'en souvenir de temps en temps et vivre. Vraiment.

Illustration : merci Fred.

vendredi 19 juin 2009

Attendre le train


L’autre jour, lors d’une de mes pérégrinations vers un congrès ou une librairie, j’attendais le train sur un quai de gare. Je l’attendais vraiment : regardant l’heure régulièrement, observant l’horizon et me demandant s’il allait arriver par la droite ou la gauche. Tout en sachant que l’heure prévue du départ n’était que dans 10 minutes. Mais je me demandais si c’était un train qui venait d’ailleurs (dans ce cas, il arriverait seulement à l’heure prévue) ou s’il partait d’ici (dans ce cas, il serait à quai plus longtemps avant, et je pourrai y monter).
Bref, l’esprit complètement encombré de trucs inintéressants. Heureusement, je m’en suis rendu compte (ce n’est pas toujours le cas…). Je me suis vu tout à coup en train d’attendre mon train comme un chien attend sa pâtée. Waf ! Rien contre les chiens, ils sont sympas, mais bon, chacun sa vie…
Je me suis dit que non, c’était vraiment « trop pas intéressant » comme disent mes filles. Alors j’ai switché vers un exercice de pleine conscience : au lieu de « faire » quelque chose (attendre) je suis passé sur le registre « être juste là » et savourer l’instant présent. J’ai laissé tomber la montre et l’horizon du bout des rails. Et j’ai tourné mon attention vers ma respiration, la façon dont je me tenais, je me suis doucement redressé, j’ai ouverts mes épaules ; puis j’ai aussi ouvert mes oreilles, j’ai écouté les sons de la gare, les rumeurs, les bruits de rails, les cris d’oiseaux ; j’ai observé la lumière de ce matin de printemps (j’avais donné une conférence la veille au soir), les mouvements lents d’un train de marchandise tout au bout des quais, les nuages, toutes les installations, les panneaux, les bâtiments au loin. Fantastique tout ce qu’il y avait à voir et à ressentir.
Fantastique comme c’était intéressant et apaisant d’être intensément là, présent à ma vie de l’instant. Lorsque je suis monté dans le train, j’étais serein comme jamais. Je ne l’avais pas attendu une seconde. J’avais juste vécu ma vie. Trop pur !

jeudi 18 juin 2009

Leçon de psychothérapie


J’aime bien recevoir des leçons, plus encore qu’en donner. L’autre jour, j’ai reçu une leçon de psychothérapie de la part d’un musicien.
Juste avant une conférence à Reims, où j’avais parlé des états d'âme, un petit concert avait eu lieu, de la part d’un duo talentueux : Naturalibus.
Après la soirée, il y avait un petit cocktail avec les organisateurs et quelques uns de leurs amis et invités. Je bavardais avec le guitariste et compositeur du groupe, lorsqu’une dame s’approche, et commence à nous raconter ses problèmes avec un de ses enfants. Je vous passe les détails pour ne pas trahir de secret, même si ce n’était pas une consultation. Mais en gros, ça se passait très mal, et elle en souffrait beaucoup.
Le souci, c’est qu’il était déjà 23 heures, que j’étais fatigué par ma semaine, le voyage, la conférence : je n’avais plus de jus (comme on dit lors d’un match de rugby). Je voyais bien que ce n’était pas simple, qu’il aurait fallu, avant de la conseiller, comprendre l’histoire de leur relation, tout ce qu’elle n’avait pas fait, ce qu’elle avait mal fait, ce qu’elle aurait pu faire, ce que son enfant lui permettrait ou non de faire… Trop long, trop compliqué… Pas envie, pas ici, pas maintenant… Je me triturais ainsi l’esprit, en me disant « tu ne peux pas non plus laisser cette pauvre dame sans réponse et sans soutien » lorsque le jeune guitariste intervint, avec un bon sourire : « C’est vrai, il vous fait du mal, mais vous savez, on ne s’en prend jamais qu’à nos proches : plus on aime, plus on fait souffrir. »
Le visage de la dame s’éclaira un peu. Rien n’était changé, mais cette simple phrase avait porté. Intelligente : elle ne niait pas la réalité des souffrances, mais elle les replaçait dans un contexte moins absurde et moins douloureux. Une belle intervention psychothérapique.
J’étais ravi, et soulagé. Pas du tout vexé que ça ne soit pas venu de moi. Et j'ai pleinement savouré cette leçon de simplicité et de naturel.

Illustration : la célèbre Berggasse, à Vienne, où vécut et exerça Sigmund Freud ; sa maison, devenue musée, est indiquée par un grand panneau rouge... Vous pouvez cliquer pour agrandir l'image.

mercredi 17 juin 2009

J’ai un problème

Tous les problèmes n’ont pas à être résolus : pour certains, il suffit d’attendre.
Et de continuer de vivre. Sans en rajouter dans la souffrance et l’inquiétude.

mardi 16 juin 2009

Âmes sensibles


Toujours lors du Salon du Livre de Poche de samedi dernier. Outre les rencontres avec lecteurs et libraires, un des petits plaisirs à y participer, c’est qu’on y croise souvent d’autres auteurs. J’y ai notamment retrouvé mon copain Gilles Leroy, romancier subtil, prix Goncourt 2007 pour son magnifique Alabama Song.
Il était tout ému, car le train qui l’amenait de chez lui avait été bloqué à cause d’un suicide sur les rails : « Tu te rends compte, la plupart des gens pensaient à leur retard et leurs ennuis à cause de ce même retard. Alors que quelqu’un venait de se donner la mort... »
Cette année, où j’ai beaucoup voyagé, cela m’est arrivé à deux reprises d’être dans un train bloqué par un suicide. Et à chaque fois j’ai eu le même réflexe : d’abord le « zut, je vais être en retard ! » ; puis la honte, dans la seconde : « tu plaisantes ou quoi ? ton petit retard minable par rapport à une histoire de désespoir absolu ? ».
Nous parlons un peu avec Gilles de ces mouvements de nos états d'âme et de nos consciences, lorsque la détresse des autres déboule dans nos petites vies bien réglées. Le lendemain, il m’envoie un mail, avec comme il dit « des questions de romancier » : après notre discussion, il a repensé à la manière dont les passagers de l’Airbus d’Air France récemment écrasé dans l’Atlantique ont du vivre leurs derniers instants. Il est frappé que tous les journalistes parlent des conditions techniques de l’accident, et pas de la conscience éventuelle que ces humains ont pu avoir des ultimes minutes de leur vie, ce qui le bouleverse.
Pour moi, ce ne sont pas que des « questions de romancier ». Mais les romanciers, grands sensibles, se les posent avec plus de constance et de violence que les autres. Parce que la compassion les habite, et avec elle la sensibilité et la curiosité pour toutes les expériences humaines. Même effroyables, même extrêmes, même ultimes...

lundi 15 juin 2009

Rencontres et dédicaces


À l’occasion de la sortie de mon dernier livre, Les États d’âme, j’ai fait un petit tour de France des librairies, à la rencontre de mes lecteurs. J’aime beaucoup ça, même si c’est fatigant ; mais bon, ce serait indécent de se plaindre d’être un auteur que les libraires invitent et que les lecteurs viennent rencontrer.
La dernière a eu lieu à Saint-Maur, lors du Salon du Livre de Poche organisé par la librairie La Griffe Noire. Comme toujours, tout un tas de petites rencontres et discussions bien agréables. Et puis, comme je le racontais dans mon mot du 19 mars, il se passe toujours à un moment quelque chose de fort, une sortie de ce qui est habituel ou prévisible.
Cette fois-ci, c’est en bavardant avec une dame un peu étrange mais très gentille : après m’avoir raconté combien elle se sent seule parfois, elle me demande de dédicacer mon livre pour sa fille et elle. J’obtempère, en lui demandant un peu qui est cette fille, si elle aime la psychologie, etc. Elle m’explique alors que sa fille est morte il y a longtemps, que cela l’a rendue folle de chagrin, et que cette dédicace, c’est une manière de garder sa mémoire vivante, à ses côtés. Je suis pétrifié, ne sachant que dire et que faire, sinon hocher la tête, et répéter « je suis désolé, je suis désolé ». Elle, elle n’a pas l’air désolée, juste contente de la dédicace et de notre discussion, avec l’air ailleurs de la personne dont la vie ne sera jamais tout à fait la même que celle des autres, ceux qui n’ont jamais perdu un enfant.
Je continue mes dédicaces, vaguement perturbé, doucement bouleversé. Content de l'avoir rencontrée. Espérant que mon livre va l'aider...

vendredi 12 juin 2009

Gratitude encore


Nous avons récemment travaillé sur la gratitude avec un de nos groupes de patients, à Sainte-Anne. Nous avons réfléchi sur les différents niveaux possibles dans la pratique de la gratitude :
- en ressentir pour quelqu’un qui nous a fait du bien intentionnellement (de l’aide, un cadeau) ;
- pour quelqu’un nous qui nous a fait du bien sans penser à nous personnellement (gratitude pour le boulanger et son bon pain ; même si nous lui avons acheté : où est le problème ?) ;
- pour d’autres humains que nous ne rencontrerons jamais (gratitude pour Mozart, Bach, tous les humains qui nous ont précédé et qui nous ont légué tout ce que ce monde a de beau).
En discutant tous ensemble, nous avons même abordé des moments tels que la contemplation d’un coucher de soleil, d’une belle campagne, d’un beau ciel, etc. Puisque c’est la nature à qui nous le devons, et pas des humains, pas de gratitude ? Si, aussi ! Gratitude pour nos parents et ancêtres qui nous ont permis d’être là pour voir ça. Pour les humains du passé et du présent qui nous ont permis et nous permettent de vivre dans un pays en paix.
Toute cette réflexion sur la gratitude nous ouvre les yeux sur cette évidence : nous devons presque tout à d’autres humains. Et nous pouvons nous en réjouir, et exprimer, chaque fois que possible, notre reconnaissance.

Illustration : merci Clémence !

jeudi 11 juin 2009

Gratitude


Récemment, mon beau-père est venu passer quelques jours à Paris. Au moment où il repartait prendre son TGV, je lui donnais un petit conseil sur les horaires, qui lui permit de partir une heure plus tôt, dans un train direct sans correspondance, contrairement à ce qui était prévu.
Rien de majeur, donc. Mais le lendemain, il prenait la peine de me rappeler pour me remercier : « Christophe, grâce à votre conseil, j’ai fait un voyage très agréable, je vous en ai été reconnaissant pendant tout le trajet. »
Mon premier mouvement intérieur fut de trouver que c’était trop de gratitude pour un si petit conseil. Puis, je me suis dit qu’il avait totalement raison (comme d’habitude en matière de psychologie du bonheur : c’est un surdoué). Après tout, le fait qu’il éprouve de la gratitude avait embelli son voyage, et sa vision du monde ; et le fait qu’il me l’exprime m’avait fait plaisir.
Le tout ne nous avait « coûté », à lui comme à moi, que quelques phrases. Quelques petits mots pour beaucoup de plaisir partagé, à se sentir solidaires et amicalement liés.
La gratitude est définitivement une bonne chose : bonne pour les personnes (elle contribue à notre bonheur et notre santé), et bonne pour les groupes humains (elle rend la vie plus douce).
Pourquoi s’en passer ?

mercredi 10 juin 2009

Tristesse

Quand on est malheureux, notre tête s'incline vers le bas, nous respirons mal.
Alors qu'il faudrait sourire, regarder en l'air, vers le ciel, respirer bien fort. Sans attendre que cela nous rende heureux ; juste pour arrêter de s'enfoncer.
Courage, courage...

mardi 9 juin 2009

Entendre crier « papa » dans la rue


Ça fait toujours drôle de s’entendre appeler dans la rue.
Je vous en parle de parce que ça m’est arrivé l’autre jour : alors que j’étais loin de la maison (à Nancy, une très belle ville) j’entends tout à coup la voix d’une de mes filles qui m’appelle. Enfin, je le croyais : c’était bien une fille qui appelait son père, mais ce n’était pas moi.
Lorsque j’entends crier « Papa ! », je me retourne toujours. Presque toujours, ce n’est pas papa Christophe qu’on appelle, mais un autre papa. Pas grave, je me sens proche alors et du père et de l’enfant.
J’aime ça, ces petites surprises qui débouchent sur de grandes prises de conscience : ça m’ouvre les yeux de l’esprit sur l’universel de la condition humaine.

PS : un lien vers une belle chanson de Francis Cabrel sur ce thème (merci à Catherine qui me l’a signalé).

Illustration : gallerie Sollertis, Toulouse.

lundi 8 juin 2009

Président


Dans mon quartier réside un clochard (je dis clochard et non SDF, car il est plutôt bien intégré, il me semble ; en tout cas, autant qu'on peut l'être lorsqu'on vit dans la rue).
Il bavarde souvent à la sortie des cafés et des commerces avec des passants qu’il connaît et croise chaque jour, comme les employés de la voirie (je n’ose plus dire « balayeurs », on a l’impression de les insulter en les appelant comme ça ; et puis, ils sont maintenant souvent équipés, certains jours, de petits camions à arroser, alors il faudrait dire « balayeurs-arroseurs »…).
L’autre jour, en passant, j’entends leurs saluts, plutôt joyeux : « Salut Monsieur le Président ! » lançait le balayeur (oups…). « Salut patron » répondait le clochard.
Ce détournement de titres et de fonctions m’a ravi. Je n’y ai vu aucune ironie ni aucune amertume : juste une manière, dans un même mouvement, de se marquer de la considération et de se moquer des puissants.

vendredi 5 juin 2009

Humour noir psychiatrique


C’est un beau métier d’être psychothérapeute. Mais pas toujours facile. Certains cas de patients nous déconcertent : nous avons alors besoin des conseils et de l’expérience de nos collègues.
Par exemple, voici le petit texte d’un confrère arrivé le 28 mai 2009 sur la mailing list de l’Association Américaine de Psychologie :

« Hi All !
I would appreciate recommendations regarding a 17 year old who has urges to drink his own blood and recently cut in order to satisfy the urge. He reported that he very much enjoyed the experience and that the blood tasted "coppery at first and then very, very sweet." He reports that the urges come when he is lying in bed at night and feel overwhelming. He disclosed his urge and the behavior at the end of the last session so I was unable to complete a functional analysis. He did state that the urge is not ego-syntonic, but the consuming of the blood is.
Some background: Morbid obesity. Moderate social anxiety. Mild to moderate OCD symptoms, primarily checking locks and symmetry in his room. Recently came out with his sexual orientation. Parents are both extremely phobic of any discomfort to their son.
I would appreciate hearing from others who have treated blood drinking urges. Any Transylvanian psychologists on the list?
Thanks. »

Pour celles et ceux qui ne comprennent pas l’anglais : il s’agit en gros d’un adolescent de 17 ans qui boit son propre sang, et se coupe volontairement pour le faire. Le collègue, un peu désemparé, demande si certains d’entre nous ont déjà eu à aider ce genre de patient. Et il conclut avec humour : "y a-t-il des psychologues de Transylvanie {patrie de Dracula} dans notre liste de diffusion ?"

Illustration : Nosferatu le vampire, film de Friedrich Murnau, 1922.

jeudi 4 juin 2009

Surnoms


J’aime bien donner des surnoms affectueux aux personnes qui me sont très proches. On faisait comme ça dans ma famille. Mais mon épouse, dont la famille ne le faisait pas, s’en agace parfois: "puisque nos enfants ont de beaux prénoms, que nous avons choisis, pourquoi ne t’en sers-tu pas ?" C’est vrai, ça, pourquoi ?
En y réfléchissant un peu, j’ai trouvé trois bonnes raisons.
La première évidemment, c’est qu’il me semble que je fais passer plus d’affection au travers d’un petit surnom affectueux.
La deuxième, c’est que c’est un signal de lien privilégié : je ne me sers jamais des surnoms en public ; mais il y a aussi des surnoms que je n’utilise qu’en tête-à-tête avec la personne, qui ne concernent qu’elle et moi.
La troisième, c’est qu’il y a sans doute là-dessous quelque chose de primitif : ne pas « user » le vrai prénom. Je sais que certaines tribus procèdent ainsi, avec un nom public, dont on se sert au quotidien, et un nom secret, à garder caché : ce dernier, possédant des vertus magiques, ne doit pas être divulgué, prononcé, etc.
Ah, un dernier point : mes surnoms sont évolutifs, c'est-à-dire que pour mes filles, par exemple, ce ne sont pas les mêmes selon qu'elles soient bébés, enfants, ou adolescentes. Le surnom, là encore, est plus flexible que le nom pour incarner la personne ou le lien qu'on établit avec elle.
Et vous, vous surnommez ?

Illustration : Coco et Kiki prennent le train, © SNCF

mercredi 3 juin 2009

Se soigner par les livres


Pierre-André Bonnet, esprit curieux et étudiant en médecine à Marseille, conduit actuellement sa thèse sur la bibliothérapie : c’est-à-dire sur la manière dont on peut aider, soulager, guider, soigner par les livres.
La bibliothérapie a été l’objet de nombreuses études montrant son intérêt et son efficacité dans différentes maladies et souffrances. Elle n’est pas une panacée, mais une aide notable, à ne pas négliger.
Alors, Pierre-André Bonnet, en plus des dimensions scientifiques de son travail, souhaite étudier et comprendre aussi les dimensions humaines, les mécanismes intimes de la bibliothérapie : comment les livres aident-ils les personnes qui les lisent ?
Si vous vouliez bien témoigner à ce propos, il serait très heureux de recevoir vos réponses sur le lien de sa thèse :
http://spreadsheets.google.com/viewform?hl=fr&formkey=cm5GamI5a1g4YVVvZ085OXJXQzExQ0E6MA
Votre anonymat sera bien entendu garanti.
Pour plus de questions : pa.bonnet@yahoo.fr
Merci d’avance !

PS : et merci de faire suivre ce message à toutes les personnes de votre entourage qui seraient intéressées.En cliquant ci-dessous sur la petit lettre avec une flèche, vous pouvez par exemple envoyer cette note en entier à un(e) ami(e).

Illustration : un cabinet de bibliothérapie.

mardi 2 juin 2009

Aurores et crépuscules


La semaine dernière, j’ai du me lever très tôt à deux reprises. Du coup, j’ai assisté au lever du soleil : bonheur intense et primitif.
J’ai alors pensé à l’écrivain américain Thoreau, une de mes idoles, qui écrivait dans son ouvrage La Vie sans principe : "Pouvoir regarder le soleil se lever ou se coucher chaque jour, afin de nous relier à un phénomène universel, préserverait notre santé pour toujours."
Se poser tous les matins et tous les soirs (en tout cas, soyons réalistes, aussi souvent que possible) face au soleil levant et couchant, respirer doucement et juste rester là, à tout savourer, tout entendre et tout ressentir, en pleine conscience…

Illustration : le beau regard mélancolique d'Henry Thoreau.

lundi 1 juin 2009

Pentecôte


Cinquante jours après la Résurrection, des langues de feu se posent sur les disciples de Jésus : l’Esprit Saint, le Paraclet, leur est envoyé, pour leur enseigner toutes choses et leur rappeler son souvenir. C’était hier.

Illustration : un cadeau de ma belle-soeur Judith.