jeudi 27 février 2020

Une vie réussie



C’est une question que je ne me pose jamais, de me demander si ma vie est réussie.. 

Et c'est une question que je n’aime pas voir les autres se poser de cette façon, avec ce genre de mots pollués : « réussite, challenge, performance, rendement, compétition… », ça me fait penser à « Rolex, 4x4, pub, frime, marketing, esclavage, pognon, fric, matérialisme... »

Et puis quand on me parle de vie réussie, ça me fait penser à la mort. Il n’y a pas de mort réussie, c’est toujours raté, de mourir, par définition. Mais notre mort, ou l’approche de notre mort, est le révélateur de cette question d’une vie réussie. Par les regrets que nous pourrons avoir à ce moment crucial.

Je me souviens d’une conversation que j’avais eue un soir avec des amis sur ce thème : chacun autour de la table faisait l’effort d’imaginer ce qu’on pourrait regretter si on devait mourir demain. Pour moi, et pour beaucoup d’autres, c’aurait été de ne pas avoir fait assez d’efforts pour me rendre heureux et rendre les autres heureux, de ne pas avoir passé assez de temps avec mes proches, mes amis…

Mais un de mes copains, à ma grande surprise, avait surtout peur de regretter de ne pas avoir réussi sa vie professionnelle, pas réussi à atteindre ses objectifs de statut, de notoriété et de richesse, pas réussi à laisser quelque chose derrière lui, une image, un héritage, une carrière...

Dans ma vie de psy, j’ai vu pleins de patientes et de patients qui avaient l’impression de ne pas avoir réussi leur vie. Des poètes qui n’avaient jamais connu le succès et toujours vécu dans la précarité, des mères au foyer qui avaient le sentiment de n’avoir rien fait d’autre qu’aimer et éduquer leurs enfants, des chômeurs qui n’avaient pas trouvé leur place dans le monde du travail…

Mais la plupart étaient des humains gentils, bienveillants, généreux, qui ne faisaient pas fait de mal autour d’eux. Leurs vies me semblaient beaucoup plus réussies que celles des grands prédateurs de la banque, du marketing, de la Bourse et des affaires, qui s'efforcent de ne pas partager et de ne pas payer leurs impôts, et qui  dévastent, par leur orgueil et leur avidité, notre planète et nos sociétés. Elle est réussie leur vie, à ces grands bandits ? Si oui, alors je préfère rater ma vie, plutôt que la réussir comme eux !

En fait, une vie réussie, c’est simple, c’est une vie tournée vers le bonheur, le sien et celui des autres : ai-je été heureux, aussi souvent que possible ? ai-je rendu heureux ? Ou du moins, ai-je aidé d’autres humains à être moins malheureux ? Ai-je fait du bien autour de moi ?

Si au moment de notre mort, nous pouvons nous dire : « oui, j’ai fait de mon mieux pour vivre heureux et rendre heureux » alors c’est qu’on a eu une vie réussie.

C’est Pierre Rahbi qui rappelle souvent ceci : « Je me fiche de la question de savoir s’il existe une vie après la mort. Ce qui est important, c’est la vie avant la mort ! »

Il a raison !

C’est pour ça qu’elle est importante cette question d’une vie réussie, et qu’il faut se la poser maintenant, tant que nous sommes vivants. Pour nous demander si on veut réussir ou être heureux ? Nous demander si on met autant d’énergie à réussir notre vie professionnelle qu’à épanouir notre vie personnelle ? Nous demander ce qu’on regrettera au moment de mourir ?

Trouvez les regrets de demain, et vous trouverez les efforts d’aujourd’hui, le chemin de ce qu’il vous faut faire maintenant pour que votre vie soit « réussie » !

Et vous, si vous deviez mourir demain, ce serait quoi votre plus grand regret ? Ou votre plus grand souvenir de réussite ?


Illustration : toutes voiles dehors vers une vie réussie ! (Frégates en mer, par Étienne Blandin).

PS : ce texte est inspiré de ma chronique diffusée lors de l'émission d'Ali Rebeihi, Grand Bien Vous Fasse, sur France Inter, le 20 mars 2018.



mercredi 19 février 2020

Nature et méditation

















Voilà presque une heure que nous sommes assis en silence dans cette grande salle baignée de lumière, dédiée à la méditation. Les uns sur des chaises, beaucoup sur un gros coussin, le zafu. Je suis, pour ma part, installé sur un petit banc japonais incurvé, le shoggi. Mais quel que soit l’endroit sur lequel nous avons posé nos fesses, les sensations inconfortables arrivent doucement. Crampes, envies de bouger, retour de vieilles douleurs que les occupations et distractions de notre vie active nous font habituellement oublier.  L’expérience méditative nous amène à la rencontre de notre corps, et ce n’est pas toujours agréable. Au moins dans un premier temps…

Alors, quand l’instructeur de méditation sonne le signal de la pause pour aller effectuer une  « marche en pleine conscience », c’est le soulagement ! Il s’agit d’une marche très lente, durant laquelle on s’efforce de se relier à toutes les sensations enclenchées par le fait même de marcher. Un peu étrange au début, car on est surtout occupé à se freiner, freiner l’automatisme de marcher vite, et de marcher pour aller quelque part. Là, on marche lentement, et on ne va nulle part. Mais en pleine conscience, le cerveau attentif et ouvert…

Et comme la semaine de retraite se déroule en été à la campagne, au grand bonheur de bouger son corps s’ajoute celui, encore plus grand, de marcher ainsi, quotidiennement, pieds nus dans l’herbe. Le premier jour, c’est délicieux. Prenant tout mon temps pour chaque pas, tout mon temps avant d’enchaîner le suivant, je contemple longuement les humbles fleurs des champs, chaque sorte de brin d’herbe, tout le petit peuple des insectes affairés. Parfois, j’oublie totalement de marcher, je relève la tête, et je contemple les arbres alentour, le ciel, les nuages qui passent tout là-haut. Et peu à peu, jour après jour, ces temps de marche pieds nus dans la nature deviennent plus que délicieux : addictifs, bouleversants, étranges.

Dans ces instants, émergent ces sentiments que les méditants (mais aussi tous les humains qui prennent leur temps) connaissent bien : des ressentis de communion profonde avec la nature, puis de dissolution de soi. Les frontières entre nous et l’environnement s’estompent : au début, c’est de la présence, puis de l’appartenance. 

Phénomène classique dans la méditation : on passe des choses que l’on savait (nous savons tous que nous appartenons à la nature, et que tous les atomes de notre corps en viennent et y retourneront) à des choses que l’on vit, que l’on expérimente au plus profond de soi, sans que les mots soient alors nécessaires (on éprouve des instants de bouleversement calme). Ce passage de la connaissance à l’expérience n’est pas anodin pour notre lien à la nature. Il nous rappelle avec force plusieurs données capitales... 

La première, c’est que ce ressenti profond et ineffable de bien-être et d’apaisement que nous offre la nature est une réalité et non de l’autosuggestion ; et c’est une réalité globale, mentale et corporelle. Les anciens avaient depuis longtemps l’intuition que nature et santé entretiennent des liens étroits, depuis le « sequi naturam » (« suis la nature ») d’Aristote jusqu’à l’œuvre de Thoreau, et de nombreux passages de son Journal : « Aucun homme n’a jamais imaginé à quel point le dialogue avec la nature environnante affectait sa santé ou ses maux. » 

Et une avalanche de travaux contemporains le confirme : amélioration durable de notre immunité après deux jours de marche en forêt, modifications cérébrales mesurables (baisse de l’activité des zones cérébrales dédiées à la rumination et aux émotions négatives, comme le cortex préfrontal ventromédian et l’amygdale cérébrale), etc. 

Les données s’accumulent au point que certains soignants n’hésitent plus à parler de vitamine V (V comme Verte) pour souligner que le contact régulier avec la nature est plus qu’un plaisir : une nécessité ! Enjeux de santé médicale donc, mais aussi sans doute de santé sociale : il est de plus en plus clair que la pollution et les environnements de béton aggravent les comportements agressifs et délinquants, et qu’à l’inverse, la présence d’espaces verts en milieu urbain diminue stress et incivilités.

La deuxième donnée, c’est que le contact avec la nature, régulier et sincère (sans utilitarisme), est une source de spiritualité. La spiritualité, c’est la vie de notre esprit lorsqu’il se confronte à l’infini, à l’absolu, au mystère, bref au plus grand que nous. 

Nous avons besoin de spiritualité, qu’elle soit laïque ou religieuse (la religion est une forme de spiritualité codifiée, dotée de dogmes et de rites) pour être pleinement des humains, et non des robots ou des consommateurs. Passer du temps dans la nature, contempler le ciel étoilé, admirer l’infinie diversité du vivants sur cette planète, se demander comment toute cette complexité et cette beauté ont pu émerger et exister, c’est cela, être humain. 

Et c’est aussi l’occasion de redécouvrir les vertus d’une attitude disparue : la contemplation, c’est-à-dire, selon les mots du philosophe André Comte-Sponville, « l’attitude de la conscience quand elle se contente de connaître ce qui est, sans vouloir le posséder, l’utiliser ou le juger ». Bref, une attitude calme, intelligente et désintéressée, totalement à l’encontre de la philosophie de vie consumériste…

La troisième donnée (mais il y en a bien d’autres encore) est  que la nature est source d’humilité. Et que l’humilité est une bonne chose dans notre monde contemporain, affolé par la promotion et l’inflation des égos, titillés par le mercantilisme et les réseaux sociaux. L’humilité, ce n’est pas se rabaisser ou s’inférioriser, mais renoncer à vouloir dominer ou mettre à son service, qu’il s’agisse des autres humains ou de la nature. 

L’immersion régulière dans la nature, et sa contemplation non moins régulière, font naître en nous des sentiments d’appartenance et de communauté de destin, mais parfois aussi d’admiration et même de cette forme d’admiration mêlée de respect et d’un peu de crainte, que les anglo-saxons nomment « awe », et que l’on ressent face à certains spectacles naturels (hauts sommets, océans, désert, très vieilles forêts, etc.).

Bref, nous avons tout à gagner à comprendre que la nature n’est pas à notre service, mais qu’elle est notre matrice. Elle n’est pas là que pour nous nourrir ou nous réjouir, mais pour nous apprendre l’essentiel : nous ne sommes en ce monde que de passage, ce que nous bâtissons et possédons nous est prêté, et tout sera à rendre et à transmettre. Alors, au-delà de l’amour et du respect que nous lui devons, demandons-nous aussi comment lui redonner une toute petite partie de ce qu’elle nous offre. 

En songeant par exemple à la phrase célèbre de John Kennedy, lors de son discours d’investiture en 1961 : « Ne vous demandez pas seulement ce que votre pays peut faire pour vous, demandez-vous aussi ce que vous pouvez faire pour votre pays ». Puissions-nous avoir nous aussi ces paroles en tête : « Ne vous demandez pas seulement ce que la nature peut faire pour vous, demandez-vous aussi ce que vous pouvez faire pour la nature » !



Illustration : une séance de marche en pleine conscience dans les Pyrénées, près de Loudenvielle (photographie Fred Richet).

PS : cet article a été publié dans la revue Sens & Santé en 2019.



vendredi 14 février 2020

Éco-anxiété : ayez peur !




Ça se passe à la fin d’une conférence sur l’éco-anxiété, cette crainte des catastrophes écologiques et climatiques à venir. Une jeune fille vient me remercier pour mon exposé, et me questionne : « Je fais de mon mieux en matière de protection d’environnement, mais je me demande si ça va suffire. Par exemple, vous pensez  que je peux continuer de rester habiter en ville, ou qu’il vaut mieux partir vivre à la campagne ? » 

Je comprends que pour elle, les problèmes écologiques, ce ne doit pas seulement être de la spéculation, mais de l’action, que c’est un sujet qu’elle prend vraiment au sérieux. Je m’empresse de lui dire que je ne suis pas un spécialiste de l’environnement et de la prédiction climatique, juste un médecin qui étudie les émotions associées à ces changements. 

Mais en tant que soignant, justement, je ne peux pas m’empêcher de la rassurer : « Vous savez, si les villes continuent de se transformer, et accélèrent encore le mouvement, si tout le monde ou presque prend son vélo ou les transports en commun, si on cesse de bétonner pour végétaliser à tour de bras, si on interdit les éclairages de vitrines inutiles et la climatisation à tour de bras, les 4x4 et les SUV, et tout ça, alors les milieux urbains resteront vivables ! Nous devons juste tous pousser en ce sens. » J’ai l’impression que je la rassure un peu. Mais ai-je bien fait de la rassurer ?

Car finalement, ce que je viens de dire en conférence, c’est que l’anxiété n’est pas forcément une maladie. Ce n’est vrai que pour ses formes extrêmes, sur lesquelles on a perdu le contrôle, dans lesquelles on ne peut plus arrêter le petit vélo à angoisses, surtout la nuit... Sinon, l’anxiété, c’est une fonction cérébrale normale, c’est simplement l’anticipation des problèmes à venir, dans l’idée de pouvoir les éviter ou mieux s’y préparer.  C’est un signal d’alarme qui peut avoir de la valeur. 

Les personnes anxieuses ne délirent pas, elles ne se focalisent pas sur des dangers imaginaires, mais des problèmes réels qui risquent de survenir. L’anxiété appartient à la famille de la peur, qui est son émotion-mère : et la peur, c’est notre réaction face à un danger bien réel, bien concret, à une menace présente, actuelle. Si un molosse court vers vous toutes dents dehors, les oreilles rabattues vers l’arrière, vous avez intérêt à avoir peur, pour courir vous mettre à l’abri. Le risque de morsure n’est alors pas seulement une question d’imagination ! 

Bien sûr, il y a des personnes plus anxieuses que d’autres, qui réagissent plus vite, plus fort, plus souvent aux situations de danger éventuel, non encore survenu. Mais il arrive que les anxieux aient raison. Que leur anxiété soit une forme de lucidité, là où la tranquillité ou l’indifférence ressemblent à de l’aveuglement. C’est le cas de l’éco-anxiété : elle ne doit pas être supprimée, sauf dans ses formes excessives et maladives, mais écoutée.

Le problème, c’est que l’anxiété est une émotion douloureuse et inconfortable. Et que la tentation est grande de la faire taire par tous les moyens, même mauvais. C’est ce qu’on appelle en psychologie les « mécanismes de défense » : c’est-à-dire les petits réflexes inconscients que nous adoptons inconsciemment pour acheter notre paix intérieure. En voici quelques exemples, appliqués à l’éco-anxiété... Le déni : « ce n’est pas un si gros problème ». Le refoulement : « un problème ? quel problème ? ». Le déplacement : « le problème est ailleurs ». La projection : « c’est vous qui avez un problème » 

Ça vous rappelle les réactions de certains pour le réchauffement climatique ? Normal, c’est leur façon de se défendre de l’éco-anxiété. Ils feraient mieux d’assumer leurs émotions inconfortables. C’est ce que cherchait à leur dire vigoureusement la jeune militante Greta Thunberg : «Les adultes répètent qu'ils doivent donner de l’espoir aux jeunes générations. Mais je ne veux pas de votre espoir. Je ne veux pas que soyez rassurants. Je veux que vous paniquiez. Je veux que vous ressentiez la peur que je ressens tous les jours. Et ensuite, j’attends de vous que vous agissiez ; je veux que vous agissiez comme si nous étions en crise, comme si la maison était en feu. Parce que c’est le cas. »

Tiens, il y a aussi une autre éco-émotion qu’il vaut mieux accepter de ressentir, plutôt que de la refouler : l’éco-culpabilité ! Ce serait bien que tous les humains qui en ont les moyens renoncent désormais à prendre l’avion pour un oui ou pour un non, pour leur seul bon plaisir d’un week-end à Rome ou d’une semaine en Thaïlande !

Vraiment, les temps changent : c’est la première fois de ma vie, en tant que psychiatre, que je souhaite voir davantage de gens anxieux et culpabilisés ! Quelle drôle d’époque…


Illustration : Greta Thunberg au Parlement Européen en 2019.

PS : cet article a été initialement publié dans le n° 49 de la revue Kaizen, en 2019.





lundi 10 février 2020

Êtes-vous météo-sensible ?




Ah, la météo ! le temps qu’il fait, qu’il a fait ou qu’il va faire ! Hors actualité brûlante, c’est le sujet de conversation numéro 1 entre les humains !

Et sans doute depuis longtemps : c’était très important à l’époque où nous vivions dans des abris rocheux ou des cabanes peu étanches et peu chauffées, à l’époque où l’essentiel de nos activités se déroulaient en plein air. Le temps qu’il faisait pesait alors totalement sur nos activités quotidiennes.

Mais ça reste aussi le cas aujourd’hui, alors que nos maisons - quand on a la chance de ne pas dormir à la rue- , nos maisons sont confortables et nous protègent des aléas du climat, alors que nous avons toute une garde-robe de vêtements nombreux et adaptés, et surtout alors que les bulletins météo font partie des programmes parmi les plus écoutés tous médias confondus et que nous savons tout sur la météo du jour avant même d’avoir mis le nez dehors.

Pourquoi revenons-nous alors inlassablement sur le thème du temps qu’il fait ?

D’abord parce que, tout simplement, nous vivons sous le même ciel et au même endroit que les gens que nous croisons. Ensuite, parce que c’est un sujet simple, et assez consensuel, accessible à tous sans distinction de diplôme ou de milieu social…

Et peut-être aussi, enfin, parce que, tout de même, nous avons l’impression que c’est important, que cela joue grandement sur nous : le beau temps nous permet un beau moral, le sale temps nous met le moral en berne et nous rappelle parfois des moments douloureux, comme dans la chanson de Barbara, "Nantes"…

Mais est-elle fondée cette relation entre le climat et le moral ? Subjectivement oui, pour la plupart d’entre nous ; mais notre subjectivité nous dit aussi que la Terre est plate, que si elle était ronde, nous tomberions, alors… En réalité, les études scientifiques ont plutôt du mal à mettre ces effets en évidence, et montent qu’ils sont réels chez certaines personnes, mais globalement, plutôt faibles.

Ainsi, selon une étude néerlandaise, conduite pendant 1 mois auprès d’environ 500 adolescents, il semble exister 4 grandes familles de personnes : les plus nombreux, environ 50%, sont globalement peu sensibles au temps qu’il fait et peu influencés par lui ; et puis 3 autres familles y sont par contre plus sensibles : les summer-lovers (qui se sentent mieux quand il fait chaud et sec) ; les summer-haters (qui sont mal quand il fait chaud et sec) ; et les rain-haters (mal quand il pleut, humide et gris).

Sans doute est-ce comme cela qu’il faut étudier l’impact de la météo, sur des échantillons de populations spécifiques. Par exemple, chez personnes fragiles : on retrouve plus de décompensations de maladies bipolaires quand il fait chaud (mais est-ce l’effet direct des températures ou une simple conséquence du fait que quand il fait chaud, on dort moins bien ? et que le manque de sommeil est un facteur de rechute chez ces patients).

On retrouve aussi plus de tentatives de suicide au début des périodes ensoleillées (les 3-4 premiers jours), ce qui est contre-intuitif ; alors qu’ensuite l’effet s’inverse (et l’ensoleillement prolongé protège alors sur la durée). C’est un peu ce qui se passe pour les antidépresseurs : un risque suicidaire augmenté lors des tout premiers jours de prescription, puis un effet protecteur ; on peut donc supposer là un possible effet biologique direct du soleil sur nos neurotransmetteurs.

Dossier passionnant, mais complexe, donc !

Mais… nous avons aussi, fort heureusement d’autres sources d’équilibre intérieur disponibles, et qui pèsent sans doute plus lourd encore que le temps : ainsi, une bonne nouvelle me rendra la pluie indifférente voire plaisante. Et un échec me fera insensible au soleil.

Allez, mieux vaut construire nous-même au mieux notre bien-être intérieur, et sa météo mentale. Quitte à savourer ensuite, librement, celle qui nous tombe du ciel. Et puis finalement, mieux vaut tout aimer. Pour la nature, il n’y a pas de « beau » et de « mauvais « temps, tous sont utiles et tous sont admirable. C’est ce que nous suggèrent les poètes, comme Christian Bobin : « Moi, je ne maudis jamais la pluie, cette petite sœur déshéritée du soleil. » 

Et vous, êtes-vous météo-sensible ou météo-impassible ?


Illustration : un paysage qui fait en général du bien au moral (photo Passou).

PS : ce texte reprend ma chronique du mardi 3 décembre 2019 sur France Inter, dans l'émission d'Ali Rebeihi, Grand Bien Vous Fasse.