jeudi 27 mai 2010
Foire du Trône
C'est un patient qui me parle de ses crises d’angoisse dès qu’il est enfermé, coincé, prisonnier.
Mais il a un fils de 9 ans, il ne veut pas lui montrer ses failles (nous discuterons longuement, durant la consultation, de ce « il ne faut pas montrer ses angoisses », d’ailleurs...).
Alors quand son fils lui demande d’aller à la Foire du Trône, il y va. Et quand il lui demande de faire un tour d’un de ces manèges où on vous attache à une nacelle pour vous secouer dans tous les sens, il dit oui, aussi. Pour lui faire plaisir, pour ne pas le limiter à cause de ses peurs à lui. Pour ne pas le contaminer avec ses phobies absurdes. Et aussi pour ne pas perdre la face.
Pendant que le manège tourne, retourne et les secoue dans tous les sens, il lutte de toutes ses forces (respire, se dit que ça va bientôt s’arrêter, etc.). La tête en haut, la tête en bas, il se bagarre pour ne pas craquer.
Enfin, c'est la délivrance, le manège commence à ralentir, la tête et l'horizon se remettent dans le bon sens. Mon patient reprend son souffle et commence à bavarder avec son fiston, qui se remet lui aussi de toutes ces secousses.
Mais tout à coup, la catastrophe ! Comme il n’y a pas trop de monde, le patron du manège leur demande par signes s’ils veulent un second tour gratuit ! Non, non, évidemment surtout pas !
Et mon patient m’avoue alors : « Je lui ai dit non, en prétextant que ce serait trop d'émotions pour le petit. Alors que c’était moi qui était épuisé par la peur ! ».
Tous ces mensonges que la peur nous impose...
Illustration : Jubilation et Désolation sont montées sur un manège, qui s'en souviendra le plus longtemps ?